Articles 11 – La résurrection, le jugement final et l’éternité (Confession de foi pratique)

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Le retour de Jésus et la fin des temps

ARTICLE N°11

Nous croyons que tous les morts ressusciteront, les justes et les injustes. Nous croyons au jugement final par lequel Dieu manifestera sa justice parfaite en rétribuant chacun selon ses œuvres. Ceux qui auront persévéré dans l’incrédulité subiront, dans un état d’existence consciente, le châtiment éternel qu’ils auront mérité. En vertu de la grâce qu’ils auront reçue par la foi, les rachetés jouiront d’une gloire éternelle dans la présence de leur Sauveur.

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Terrain miné

Le thème de la fin des temps est un thème particulier, et les réactions des uns et des autres varient… Certains sont effrayés, d’autres passionnés, voire excités à outrance. Il faut dire que le sujet est complexe et les passages bibliques qui traitent du sujet ne sont pas des plus aisés à comprendre. Ainsi, de tous les textes du Nouveau Testament, l’Apocalypse de Jean est certainement le plus difficile. Il est aussi celui dont l’interprétation a évolué le plus considérablement au cours des siècles1.

Plusieurs chrétiens sont tombés dans un piège appelé l’illuminisme. C’est une sorte de maladie, une fièvre apocalyptique qui se caractérise par une attente exagérée de la fin, avec un abandon du quotidien. S’il convient de veiller, de prier, d’être en attente, il ne s’agit pas pour autant d’abandonner la vie « normale ». Or, au cours des siècles ont surgi des croyants et des communautés qui abandonnaient les tâches ordinaires de la vie pour garder les yeux fixés sur le ciel d’une manière frénétique. Le témoignage qui a été rendu par ces communautés et ces chrétiens a été catastrophique, laissant la porte ouverte à de nombreux abus. À l’inverse, un autre piège peut guetter : c’est celui de l’indifférence. Pourtant, la doctrine du retour du Seigneur est essentielle et a de nombreuses conséquences pratiques. Les chrétiens sont appelés à veiller et ils savent que ce qui est vécu actuellement n’est pas la réalité dernière. La réalité dernière est en Jésus-Christ, c’est son royaume, et ils y sont associés en étant citoyens des cieux.

C’est donc dans l’équilibre que le chrétien est appelé à vivre, en tenant compte de ce que la Bible dit clairement sur le sujet. Et au-delà des débats, bien des choses sont accessibles. Il convient de rappeler que Apocalypse veut d’abord dire « révélation » ou « dévoilement ».

Les modalités au sujet de la fin des temps ont donné lieu à de nombreuses interprétations et conjectures. Ces différentes options ont densifié un peu plus le sujet. Il ne s’agit pas ici de les présenter et les commenter, mais de rester sur ce qui est fondamental. En effet, si plusieurs écoles d’interprétation existent, toutes insistent sur une réalité essentielle : Jésus-Christ vient (Apocalypse 1.7). C’est l’élément primordial de l’eschatologie biblique, qui passe vite au second plan quand on cherche à connaître précisément tous les détails. Ainsi, on peut discuter sur les signes, sur la place de l’antéchrist, sur la chronologie, mais pas de cet élément central.

Le retour du roi

Dans le texte biblique, la venue de Jésus est décrite comme étant inéluctable, visible de tous, et souverainement décidée par Dieu, qui seul en connaît le moment. Cette venue est un acte libre du Seigneur lui-même, et se présente comme une certitude qui doit encourager les chrétiens.

À la suite de Paul, le chrétien peut donc affirmer qu’il possède une espérance. Henri Blocher explique que les croyants sont des espérants. En deux mots. Pour l’illustrer, la Bible utilise deux images : l’ancre d’un bateau (Hébreux 6.19), seule sécurité lorsque ce dernier est malmené par les éléments, et le casque, celui de l’espérance du salut (I Thessaloniciens 5.8), indispensable pour protéger les fonctions vitales du soldat et assurer sa sécurité lors du combat.

Cette venue est attestée de nombreuses fois dans la Bible, et ce dès l’Ancien Testament (avec la mention du « jour » chez les prophètes par exemple). Les croyants de tous les siècles et de toutes les nations prient : Viens Seigneur ! En araméen : Marana Tha ! Et la réponse de Jésus, que l’on trouve plusieurs fois en Apocalypse : « Je viens bientôt / promptement » (Apocalypse 3.11 ; 16.15 ; 22.7,12,20), est ainsi répétée trois fois dans le dernier chapitre de la Bible ! Pour la petite note linguistique, il est intéressant de savoir qu’en hébreu, « espérer » se dit « attendre ».

Jésus viendra de la même manière qu’il a été enlevé. Il reviendra de façon physique. Il sera vu de tous, il se tiendra physiquement face à tous, et il nous faudra nous tenir devant lui. Telle est l’espérance de l’Église. Telle a été l’espérance des chrétiens pourchassés dans Rome et ailleurs, et persécutés. Telle est l’espérance des chrétiens de tous les temps2. Il vient !

La victoire de la vie

Lors du retour du Seigneur, plusieurs choses magnifiques vont advenir avec lui. Le retour du Christ, c’est le triomphe de la vie !Jésus lui-même parle d’un renouvellement de toutes choses (Matthieu 19.28), sorte de renaissance pour la création entière3. Tout ne sera que vie à ce moment-là. « La vie c’est le Christ », affirme Paul (Philippiens 1.21). Quand il paraîtra, il y aura la pleine victoire de la vie. La mort sera vaincue définitivement (I Corinthiens 15.26). Par sa venue, Jésus communiquera à tous les siens la victoire sur la mort.

Il y aura la résurrection des corps, et les corps périssables des chrétiens seront transformés en corps « incorruptibles ». Selon ce qu’affirme la Bible, les décédés ressusciteront à ce moment, et ceux qui sont encore en vie aujourd’hui mais qui sont petit à petit grignotés par la mort 4 seront aussi glorifiés et recevront un corps transformé. Cela signifie que ce nouveau corps ne vieillira plus et qu’il ne sera plus sujet à aucune faiblesse ou maladie. Il sera entièrement sain et fort à tout jamais5.

Selon les éléments que W. Grudem a collecté dans le texte biblique, le nouveau corps sera beau, glorieux (I Corinthiens 15.43), rayonnera de l’éclat qui entoure la présence de Dieu (Matthieu 13.43), peut-être comme le visage de Moïse autrefois, il sera plein de force (I Corinthiens 15.43), comme ce que Dieu avait prévu au départ de la création. En fait, ce nouveau corps sera semblable à celui de Jésus-Christ ressuscité. Ses disciples ont pu le toucher, Jésus a mangé avec eux. Comme les disciples ont pu le reconnaître, les théologiens pensent qu’il y a une certaine continuité entre notre corps d’aujourd’hui et celui de demain6, et en même temps, ce sera un corps transformé et glorieux…

L’espérance de la résurrection

Il vaut la peine d’expliquer ici un point de doctrine, souvent mal compris au sujet de l’après-mort. Puisque le Christ n’est pas encore revenu, lorsque des chrétiens meurent aujourd’hui, ils rejoignent l’« antichambre » de cette victoire finale, comme le dit Henri Blocher, ou comme le dit W. Grudem, ils arrivent dans un état intermédiaire. Ils sont déjà auprès du Christ. Ils sont heureux dès maintenant, mais ils n’ont pas encore le corps de résurrection. Ils attendent7 cette résurrection eux aussi. Ils connaissent déjà la plénitude de la vie spirituelle en sa présence, simplement ils ne possèdent pas encore de corps glorieux, et ils ne vivent pas encore dans la nouvelle création, sur la nouvelle terre, où tous les croyants vivront ensemble la plénitude de vie. Mais lorsque le Christ paraîtra, ils ressusciteront avec un corps glorieux, alors que le corps de ceux qui sont restés sera transformé. Pour le dire de manière plus directe, l’espérance chrétienne n’est pas celle de vivre une vie désincarnée en mode patachon sur un nuage ; non, les chrétiens vont vivre une vie réelle, glorieuse, physique, incarnée dans un corps renouvelé, en présence de Dieu, sur une terre renouvelée, libérée de l’influence du péché et de la mort. Il ne faut pas confondre l’état intermédiaire et la victoire finale ! Pour les premiers chrétiens, l’espérance ultime n’était pas d’être au ciel sur un nuage avec une harpe, triste déformation caricaturale du Moyen Âge qui a la peau dure.

Ainsi, Jacques Buchhold explique avec force que L’espérance ultime des croyants n’a jamais été la vie éternelle de l’âme sans corps, mais c’est la résurrection, la rédemption de l’homme tout entier et de la création elle-même (Deutéronome 12.2-3 ; Romains 9.19-23 ; Apocalypse 20.11-13)8. De nombreux textes attestent cette espérance en la résurrection et non dans une sorte de flottement dans les airs (Jean 6.44, Actes 3.21, I Pierre 1, II Pierre 3.13, I Corinthiens 15, Éphésiens 1.10, Philippiens 3.8-11, Apocalypse 21-22…)

Notre espérance c’est la résurrection !9 Il faut encore préciser que ceux qui sont morts sans croire en Jésus ressusciteront aussi. Mais ils n’auront pas de corps semblables au Christ, ils n’auront pas de corps glorieux, expression réservée à ceux qui ont cru. La Bible ne donne pas de précision. Certains prétendent que ce seront des corps malades, des corps abîmés… Ce sont des suppositions, le texte affirme simplement que nous ressusciterons tous physiquement. Certains pour la gloire, d’autres pour vivre les conséquences du jugement.

La réalité du jugement final

En effet, lorsque le Christ paraîtra, il y aura alors un jugement. Jésus est le juste juge qui vient juger les vivants et les morts (1 Pierre 4.5). C’est à ce moment que seront ouverts des livres, selon Apocalypse 20.11-15. D’abord seront ouverts les livres actant tout le vécu et l’action des humains. Chacun sera jugé selon ses œuvres. Le texte de Matthieu 25 donne une illustration frappante de cette réalité. Ce jugement, c’est le moment où tout ce qui a été dissimulé sera rendu visible10. Ce que personne n’a vu, ce qui s’est fait en cachette, qui a été camouflé, tout sera révélé, parfaitement. Les voiles posés sur les secrets seront levés, les masques seront déchirés, et l’hypocrisie dévoilée. Ce ne sera pas un jugement sur la base de la réputation, ni sur l’apparence. Ce ne seront pas les belles paroles et les pieuses intentions qui seront révélées, mais tout ce qui a été vécu ou non vécu. Il n’y aura pas non plus de possibilité de justifier ou d’argumenter. Jésus-Christ, dans toute sa gloire, sera face à chaque humain, et chacun devra rendre compte à son Créateur. Et justice sera rendue, réellement et parfaitement, sans aucune faille. Le mal sera dénoncé, condamné, jugé.

En réalité, ce serait terrifiant s’il n’y avait que ces seuls livres. Aucun humain n’échapperait à la colère de Dieu. Les humains, imparfaits, sont aussi rebelles à Dieu. Les hommes et les femmes cherchent leurs propres intérêts et non la gloire de Dieu depuis la chute en Genèse 3. C’est la raison pour laquelle la Bible affirme en Ésaïe 64.5 que même leurs bonnes œuvres sont comme des linges souillés devant Dieu ! Les humains ne peuvent pas présenter la moindre défense devant le Roi des rois. Heureusement, un autre livre sera ouvert :le livre de vie, dans lequel sont notés les noms de ceux qui appartiennent à Jésus. Ils sont ceux qui ont demandé pardon à Dieu et ont mis leur foi en lui. Le texte biblique précise que ceux dont le nom n’apparaît pas dans le livre de vie sont condamnés. Il n’y a pas de voie médiane. Ainsi, nos œuvres condamnent ; mais si nous avons reçu la justice du Christ, alors nos noms sont dans le livre de vie (Colossiens 1.13-14).

Chose incroyable pour ceux qui sont en Jésus-Christ, au moment de ce jugement, tout ce qui a été fait par amour pour lui, ces œuvres imparfaites, Dieu en comblera les déficits et il récompensera les auteurs en fonction de leurs œuvres11. Ainsi, non seulement Dieu permet aux chrétiens d’être acquittés lors du jugement par Jésus, mais en plus il les honorera des petites choses imparfaites qui auront été réalisées par amour pour lui.

Le royaume de Dieu et son peuple

Le dernier point que l’on peut mentionner avec l’apparition du Christ est qu’il installera son règne sur la terre. Dès lors, plus rien ne s’opposera à sa volonté. La Bible reste assez vague sur la réalité physique finale à venir. Il est question de festin, de banquet, de noces. Quoi qu’il en soit, la vision biblique est celle de quelque chose de bon, de joyeux et d’harmonieux. C’est l’image d’un lieu où les larmes auront disparu, où l’amour régnera en maître et où la vie sera totale, et l’humain sera éternellement en présence de Dieu (I Corinthiens 15.28). Le rêve des humains de vivre dans une société parfaitement juste, où chacun peut vivre heureux, libre, en sécurité sera alors réel. Le Christ régnera et rien ne pourra assombrir la majesté de son règne. Paix et joie seront pour tous. Abondance de vie, comme dans une fête parfaitement réussie qui ne finit jamais. Pour parler de cette réalité, la Bible parle de la nouvelle Jérusalem, qui descend sur terre avec le Christ. Il s’agit d’une ville symbolique, son nom est : Ville de la paix.

La vie éternelle (expression de Jean), ou le royaume de Dieu (expression des Évangiles synoptiques), n’est pas uniquement une vie de contemplation, ou de louange musicale sous forme de chorale céleste, même s’il est probable que cela fasse partie du programme, plusieurs textes l’attestent. Mais ces textes permettent aussi de réaliser que les chrétiens glorifiés seront actifs. Certains théologiens pensent qu’il y aura encore la possibilité de travailler, comme en Genèse 1-2, mais libérés de la malédiction de la pénibilité. Il y aura de l’activité, mais délivrés du piège de la performance si présent en postmodernité. En effet, l’adoration ne se limite pas à la louange musicale et à la contemplation, mais l’activité est aussi une adoration quand elle est faite pour la gloire de Dieu. La Bible parle en tous les cas d’une vie physique, dans des corps glorifiés.

Il y a donc une réalité physique, bien que mystérieuse, il y a une réalité relationnelle, bien que différente. L’exemple de Jésus ressuscité donne une idée de ce qui se passera. Ses amis, sa famille ont pu le reconnaître. Ils ont mangé ensemble, ils ont bu, ils ont ri, il a pu les enseigner. Il y a ici une vie concrète, physique, palpable. Nombreux sont ceux qui pensent que le chrétien retrouvera alors ses amis chrétiens, les membres de sa famille qui ont aussi placé leur foi en Jésus-Christ. Et que loin d’oblitérer tout ce qui était avant par une sorte de grande amnésie, les chrétiens se reconnaîtront et poursuivront leurs relations. On est là devant quelque chose de vertigineux. L’Église est le peuple éternel de Dieu, même les portes de la mort ne prévaudront pas contre elle !

Certains commentateurs estiment que les humains alors glorifiés vont explorer le nouveau monde parfait créé par Dieu, d’autres considèrent probable que des arts seront engendrés, que la recherche scientifique se poursuivra, que des découvertes seront réalisées, et que toutes ces choses rempliront les chrétiens d’adoration et de joie, en découvrant toujours plus les grandeurs insondables de Dieu. Quoi qu’il en soit, les chrétiens glorifiés seront vivants, heureux, en pleine créativité, usant d’imagination et des talents que Dieu sublimera. Dieu donnera ainsi de partager sa gloire et cela prendra toute l’éternité. Il faut relever ici l’existence continuée des différentes cultures, épurées par l’évangile, qui ensemble célébreront la gloire de Dieu. Toutes les ethnies vont ainsi contribuer au règne de Dieu, toutes les personnalités, les cultures, et l’ensemble du peuple de Dieu ; l’Église une sera parfaitement unie pour le faire.

Voici l’espérance chrétienne. C’est une espérance glorieuse, grandiose, qui est offerte en Christ seul ! À lui soit toute la gloire ! Maintenant et éternellement !

Quand ?

La question de la date de son retour est celle qui a fait le plus de vagues. La Bible est pourtant assez explicite, ainsi

Quant au jour et à l’heure où cela se produira, personne ne les connaît, ni les anges du ciel, ni même le Fils ; personne, sauf le Père, et lui seul.12

Matthieu 24.36

Nul ne sait le moment du retour du Christ. Et il n’est pas sérieux de jouer sur les mots et d’imaginer qu’il serait possible de savoir la semaine, le mois… Jésus a dit que l’humain ne peut pas savoir quand cet événement surviendra. Par contre, la résurrection de Jésus introduit une tension entre un déjà-là, manifesté dans la résurrection du Christ, et un pas-encore, la glorification13. Nous vivons actuellement dans cet entre-deux14. En effet, selon la Bible, avec la résurrection, l’humanité est entrée dans les derniers temps (Hébreux 1.1-2 ; I Pierre 1.20). En attendant le retour du Roi des rois, les chrétiens sont appelés à vivre en tenant compte de cette réalité : Jésus-Christ revient, il apportera la vie en abondance et il installera son règne qui n’aura pas de fin.

Réinvestir la doctrine de l’œuvre du Christ

Quelques pistes concrètes en lien avec notre piété personnelle

Le chrétien prend du temps dans sa journée pour développer sa relation personnelle avec Dieu. Or, ces temps ne sont que l’anticipation de ce qu’il vivra dans l’éternité où il sera avec Dieu, face à face. Ces temps ont donc quelque chose de grandiose, car si les relations entre chrétiens se poursuivent au-delà de la mort, la relation du chrétien et de « son » Dieu, pour reprendre la formulation de Paul (Romains 1.8), se poursuit elle aussi. Chaque chrétien a donc tout intérêt à développer sa relation avec Dieu, qu’il ne voit pas pour le moment, car un jour ses yeux le verront ! L’image de la fiancée qui écrit à son fiancé et le découvre progressivement avant de le retrouver enfin face à face illustre assez bien ce lien qui peut être développé ici et maintenant. Ce n’est pas une obligation piétiste, mais un privilège qui anticipe l’union éternelle !

Durant l’éternité, les chrétiens glorifiés seront amenés à honorer et adorer Dieu, non seulement par le chant, mais aussi par leur activité. Cette perspective implique que dès à présent, ils sont appelés à vivre cette réalité par anticipation. En effet, c’est le même Seigneur qu’ils vont honorer. Autrement dit, toute leur activité est censée glorifier Dieu, que ce soit en Église, au travail ou dans le quotidien domestique (I Pierre 2.12).

La place du travail est à investir en particulier. Dieu veut utiliser nos métiers ordinaires comme pied de lampe. Les endroits où nous accomplissons notre travail nous placent en position de visibilité15. Il s’agit donc d’intégrer des valeurs chrétiennes, et notre relation avec Dieu, dans la profession qu’on exerce. Ensuite, une fois que j’ai accompli mon travail comme employé, j’ai encore d’autres choses à accomplir, comme époux, parent, paroissien, voisin et citoyen, sans oublier que je suis également appelé à me reposer un jour par semaine et à jouir des bontés de Dieu…16. Chacune des sphères qui composent la vie du chrétien (travail, famille, Église, éducation, politique et loisirs) doit ainsi être vécue pour la seule gloire de Dieu et dans un esprit d’adoration. C’est en tant que membre de la communauté de rois-prêtres (I Pierre 2.9) que le chrétien est appelé à vivre dans ce monde.

Quelques pistes concrètes pour l’Église communauté

Il apparaît important de lancer, à la suite de N.T. Wright, un vibrant appel à replacer l’espérance chrétienne dans l’enseignement des communautés locales. Bien trop de chrétiens sont désarmés face à la mort, et ne savent pas exactement ce qu’est leur espérance, pourtant si lumineuse. Or, la souffrance, la maladie et le vieillissement amènent avec eux toutes sortes de questions, et cette doctrine est un élément essentiel pour rassurer, encourager et fortifier ceux dont les forces physiques manquent.

De même, face à la mort d’un proche, il est nécessaire que les chrétiens soient au clair sur ce qui se passe. La confusion entre l’état intermédiaire et l’état final est source de bien des conjectures hasardeuses. Nombreux sont ceux qui inventent tout un amalgame de différentes sources pour composer à leur guise une espérance d’après la mort, avec trop souvent des éléments issus du paganisme. Certains vont jusqu’à consulter des médiums ou à honorer des défunts par des cultes particuliers empreints de pratiques culturelles animistes.

Il est aussi essentiel d’enseigner cette doctrine dans une optique apologétique. En effet, si beaucoup de personnes de notre entourage seront insensibles aux remarques moralisantes sur le péché, nombreux sont ceux qui seront particulièrement intéressés par une vision de l’après-la-mort aussi lumineuse que celle que propose l’Évangile. Il y a là une piste très intéressante pour le témoignage, déjà proposée par l’apôtre Pierre, de rendre compte de son espérance (I Pierre 3.15).

Enfin, la continuité relationnelle de l’Église, au cœur de l’espérance chrétienne, est à affirmer avec force. L’Église est le peuple éternel de Dieu, et les relations bâties en Jésus-Christ sont appelées à durer. Aussi sont-elles à soigner, cultiver et développer. La communion fraternelle en Église n’est pas semblable à d’autres relations que l’on peut vivre dans un club de loisirs. Nous sommes frères et sœurs, et pour l’éternité. Nos relations ne vont pas recommencer au moment du retour du Christ, mais se prolonger. Une telle réalité implique de vivre la repentance, le pardon et la réconciliation (Matthieu 18), mais aussi régulièrement d’user de grâce, car nous sommes tous des gens blessés et imparfaits. Bref, nous sommes invités à vivre des relations saines, qui honorent le Seigneur. Nous ne sommes pas encore au repas de noces éternelles, mais nous pouvons vivre ensemble l’apéro des noces… Ce qui peut être assez sympathique !

Quelques pistes concrètes au niveau de l’Église universelle

Il est significatif que les différentes cultures seront représentées dans l’éternité, en présence du Seigneur. Le peuple de Dieu est un peuple multiculturel, et même interculturel. Cette réalité finale de l’Église une devrait interpeller notre manière d’être Église locale. La nécessité de l’intégration de tous dans un même corps, dans une même famille devrait remettre en question notre manière monochrome de vivre l’Église… L’Église de Jésus-Christ dépasse les barrières qui existaient hier (Galates 3.28-29 ; voir aussi le cas d’Onésime dans la lettre à Philémon). Si c’est un défi, c’est aussi une opportunité de vivre ensemble ce que nous annonçons. Quel témoignage que de présenter l’espérance du peuple de Dieu uni en Jésus-Christ au-delà des distinctions culturelles !

Par ailleurs, puisque les chrétiens vont vivre l’éternité ensemble, il y a des divisions qui n’ont pas lieu d’être. Nous avons beaucoup multiplié les Églises et les unions par un phénomène de divisions, vernissées de spiritualité… Si nos unions d’Églises sont ainsi la marque de la grâce de Dieu qui a souvent récupéré des faux départs pour de belles œuvres ensuite, ces unions portent aussi la marque de notre péché et de notre orgueil, qu’il nous faut assumer (sans forcément y renoncer, mais c’est à reconsidérer). La réconciliation, le travail en commun, la mutualisation, la coopération devraient ainsi être au menu des conseils d’administration, tout comme les partenariats (à double sens !) avec les Églises d’autres pays.

Quelques pistes concrètes au niveau des ministères

L’espérance chrétienne devrait être présentée de manière claire lors des cérémonies d’adieu. Il est frappant de considérer le nombre de prédicateurs mal à l’aise avec cette thématique de la mort. Il semble utile de bien former ceux qui ont des responsabilités dans l’Église à ce sujet. Quand Martin Luther vit sa fille bien-aimée Magdalena agoniser à cause de la peste alors qu’elle n’était âgée que de quatorze ans, bien que très affecté, il n’était pas troublé. Le cœur brisé, il s’agenouilla près du lit de la mourante et supplia Dieu de la libérer de la douleur. Lorsqu’elle mourut et que les charpentiers clouèrent le couvercle de son cercueil, Luther s’écria : « Allez-y à coups de marteau ! Au jour du Jugement dernier, elle ressuscitera. » Si tous n’ont pas la verve d’un Luther, il est essentiel d’avoir une conviction fermement ancrée à ce sujet pour accompagner ceux qui sont dans le deuil.

Les ministères sont des dons offerts à l’Église (une), et la perspective eschatologique unie devrait inciter les uns et les autres à partager, à offrir, et à s’offrir, pour le bien de l’ensemble. La mise en réseau, le partage de ressources pour soutenir des ministères transversaux (évangélistes, docteurs, ministères spécialisés : jeunesse, louange…) pourrait fleurir et bénir l’ensemble d’un bassin d’Églises.

Quelques pistes concrètes pour vivre cette doctrine dans notre rapport au monde

Ayant une espérance si vive, le disciple de Jésus-Christ et l’Église osent vivre différemment dans le monde. C’est parce que [les chrétiens] croient que ce qui est immédiat et visible n’est pas toute la réalité, qu’ils peuvent faire un choix éthique […] Ils sont capables de renoncer à un avantage immédiat ou à court terme […] ou dédaigner une gloire éphémère par amour pour le Seigneur et en vue d’un bonheur plus grand et plus durable. 17 Au-delà de la dimension individuelle, l’Église peut être une voix prophétique de première importance en postmodernité. Parler d’espérance au sens chrétien du terme, c’est déjà aller à contre-courant dans un monde qui a perdu la plupart de ses illusions et qui préfère se perdre dans des plaisirs immédiats plutôt que d’investir dans un bonheur différé mais plus durable. J’en veux pour preuve la frénésie de consommation, la multiplication des aventures sentimentales ou la folie de la spéculation financière qui ne jure que par l’enrichissement à court terme18. L’espérance chrétienne a donc de quoi interpeller ce monde, et remettre certaines priorités au cœur de la vie des communautés chrétiennes.

L’espérance chrétienne de la résurrection est la raison d’être de nos cultes pour le Christ le dimanche matin. Parce que c’est le premier jour de la semaine, le jour de sa résurrection (jour travaillé alors), les chrétiens ont choisi de dire ensemble leur joie de lui appartenir et de vivre avec lui !

L’action de l’Église dans le monde, en Église rassemblée ou dispersée, dit quelque chose de son espérance. En effet, ce que Dieu le Créateur a fait en Jésus-Christ est un exemple de ce qu’il prévoit de faire pour le monde dans son ensemble19. L’Église est le peuple du Dieu victorieux qui vient établir son règne pour l’éternité ! Les chrétiens honorent donc Jésus chaque jour, ils témoignent de lui en paroles et en actes, parce qu’ils se savent aimés. Et ils le font parce que la mission à laquelle est appelée l’Église consiste à mettre en œuvre la résurrection de Jésus, une façon d’anticiper la nouvelle création finale20. Vivons cette réalité en recherchant la justice, c’est-à-dire la volonté de Dieu, sur la terre comme au ciel, l’intégrité, le beau, le vrai, le bien, en reflétant par une vie personnelle et communautaire ce que Dieu va faire pour ce monde en y instaurant la pleine justice et la vie abondante.

 

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